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- La Criaillerie : trouver réponse et beauté dans la communauté
Un rayon mince mais fort d’un soleil de printemps me suit alors que je me rends à la Criaillerie, un matin de semaine dans Saint-Marc.
Roxanne Lacourcière, artiste visuelle dont on a pu voir les œuvres dans les ruelles de Shawinigan lors d’Interzone m’offre un thé alors qu’Étienne Turmel est à ranger des planches dans l’aménagement évolutif à aire ouverte, à la fois lumineux et coloré qui ne laisserait jamais deviner avoir autrefois abrité une rôtisserie de quartier.
Il y a dix ans, alors que Roxanne était dans une période post-maîtrise où elle ne voyait plus le bout avec ses créations artistiques, elle est allée s’assoir dans l’atelier de Nathalie Vanderveken, également artiste en Mauricie, qui faisait des patrons de tissus. Cette dernière lui aurait dit « Pourquoi tu te mettrais pas à coudre dans tes dessins? » Outre la suggestion qui verra le jour dans des broderies, Roxanne reste marquée de cet échange né organiquement, dû à cette proximité entre deux artistes, dans un même lieu.
« Ça a comme mis une étincelle à l’intérieur de moi : c’est une nécessité d’avoir la communauté autour de nous. »
Roxanne Lacourcière, cofondatrice de la Criaillerie
Tout et tous sous un même toit
Plus tard, elle rencontre Étienne et Andréanne Thiffault Dessureault à travers une coopérative d’artisan·es. Ce qui en est ressorti – outre d’avoir accès à un atelier – est ce besoin d’être ensemble, de voir d’autres artistes. Attiré·es également par la spontanéité et la possibilité d’organiser des activités thématiques ou soirées loufoques, il devient impératif de trouver le lieu pour le faire.
« À Shawinigan, il y a une tonne d’artistes autodidactes. On a plein d’amateurs d’art qui sont intéressés mais qui ne savent pas trop par où s’y prendre. On a aussi nos artistes qui ont fait leurs classes. Tout ce bassin-là n’avait pas de place pour vraiment se retrouver. », m’explique Roxanne.
L’accès à un salon, une petite cuisine, un bureau, une imprimante, et une salle de classe sont offerts aux membres adhérent·es de la Criaillerie. Des cartes d’accès mensuelles sont également disponibles pour l’accès à l’atelier d’art imprimé et de sculpture.
« Viens faire de l’art, on décidera après si on l’accroche dans un musée, mais rentre, viens nous voir. »
Étienne Turmel, cofondateur de la Criaillerie
Ils et elles étaient plusieurs à s’être rassemblé⸱es le 7 décembre 2023 pour assister à la grande ouverture de la Criaillerie. © Emilie Duchesne
Un accueil souhaité dans le quartier
Depuis l’ouverture, la cofondatrice témoigne de l’engouement autour de leur offre. Tous·tes bénévoles occupé·es avec leur emploi principal, les trois ami·es peinent à répondre à l’ampleur générée. Toutefois, on ne peut que constater à quel point le lieu s’ancre finement dans la ville. La collaboration avec la Ville de Shawinigan pour les Découvertes Plein Air, ces détours créatifs qui auront lieu à l’été pour mêler pratique artistique et loisir ludique en nature suscitent déjà l’intérêt. À l’heure où cette entrevue a lieu, il et elles sont à rechercher encore les meilleurs créneaux pour donner les cours à la demande de la population, variée en âge et en horizons. Le fait de recevoir autant d’appels à collaborer, que ce soit avec écoles, organismes ou citoyen·nes, leur fait réaliser qu’il et elles ont réussi à « mettre le doigt sur le bobo », combler ce qui manque.
La Criaillerie offre des ateliers créatifs à destination des adultes comme des enfants. © Emilie Duchesne
L’importance d’un « troisième lieu »
L’augmentation du coût de la vie a des conséquences sur le quotidien de tous et toutes. Beaucoup continuent de perdre le privilège du bain social des activités et sorties, et ne vivent désormais qu’en deux lieux : le travail et la maison. Le troisième lieu, est ethnologiquement reconnu comme étant là où les humain·es peuvent se permettre de se poser, d’échanger, de refaire le monde. Que la Criaillerie soit née d’une initiative citoyenne en résonnance aux besoins citoyens est une démonstration d’une humanité qui fonctionne, entre l’organisation, la créativité et la communauté. Une effervescence qui se nourrit du contact et de la découverte des autres.
« À force de te tenir avec des gens inspirants, tu finis par être inspiré », ajoute Étienne alors que je me prépare à repartir du 1623 St-Marc, la tête pétillante des nouvelles possibilités qu’offre ce lieu artistique pour tous et toutes.
Pour soutenir ou consulter la programmation d’activités mensuelle de la Criaillerie, c’est par ici. Sinon, vous pouvez toujours suivre l’initiative sur Instagram et sur Facebook. Il est également possible de se procurer une carte de membre, des boîtes d’activités, cartes-cadeaux et plus, mais les criailleurs insistent qu’on passe les voir, qu’on ait un don pour les arts, ou juste, et surtout, un don pour la curiosité.