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- L’art du parfum : quand Léa Hiram fait respirer le territoire

Au détour d’une exposition ou d’une installation sensorielle, Léa Hiram ne laisse personne indifférent. Parfumeure, anthropologue et artiste franco-canadienne basée à Shawinigan, elle explore depuis vingt ans l’art olfactif. Ses parfums, bien plus que des fragrances, deviennent des œuvres à part entière : ils habitent l’espace, éveillent les souvenirs et dialoguent avec d’autres formes d’art. Une rencontre avec elle, c’est une plongée dans un univers aussi sensible qu’inédit!
Léa impressionne avec ces nombreuses études : diplômée de la Grasse Institute of Perfumery, elle a aussi fait un baccalauréat en Arts de la Scène en France ainsi qu’une maitrise en anthropologie à l’Université Laval. Passionnée des odeurs et des parfums depuis toute petite, elle est maintenant parfumeure, entrepreneure, anthropologue et artiste multidisciplinaire.
Léa est parfumeure, spécialisée dans la création de parfums naturels pour de grandes maisons. Elle compose des recettes uniques : parfums de peau, bougies, ambiances olfactives, et plus encore. Elle est également fondatrice de l’entreprise Théodore, qui conçoit des expériences olfactives sur mesure, principalement destinées aux musées et au secteur touristique. Léa a notamment recréé des odeurs d’ici, comme celle du fleuve Saint-Laurent et des forêts mauriciennes, offrant des voyages sensoriels ancrés dans le territoire.
Plus encore, Léa participe et crée aussi différentes expositions, telle que Territoires Olfactifs, présentée en 2024 à la Galerie d’art du Parc, qui raconte sa relation avec le territoire et son expérience poétique du paysage de la Mauricie.
Découvrir Territoires olfactifs« L’art olfactif convoque des strates de vécu, de mémoire et d’affect, souvent au-delà des mots. »

Présentée à la Galerie d’Art du Parc en 2024, l’installation interactive Territoires olfactifs de Léa Hiram témoigne de la relation particulière qu’entretien l’artiste avec le territoire. © Michel Julien
Qu’est-ce que l’art olfactif?
Lorsque j’ai demandé à Léa ce qu’est l’art olfactif, elle m’a offert sa propre définition : « L’art olfactif utilise les odeurs et les parfums comme un médium d’expression à part entière. Il prolonge la formule d’une composition olfactive – déjà en soi une œuvre artistique –, dans une mise en scène qui lui donne une nouvelle incarnation. Dans un monde saturé d’images, l’odorat, sens longtemps négligé dans l’histoire de l’art, engage autrement le spectateur. »
L’art olfactif, c’est considérer une odeur comme une œuvre d’art à part entière. Mais comme il n’existe pas encore de cadre précis pour créer avec les odeurs, elles doivent souvent s’appuyer sur d’autres formes — une image, un son, un espace — pour prendre vie : « L’odeur est en soi une œuvre d’art, mais il n’y a rien qui régit cette forme de création. Elle se greffe à d’autres formes de représentation pour pouvoir exister. »
Les odeurs qu’elle crée peuvent se présenter sous forme liquide, comme dans les parfums, ou être intégrées à des dispositifs variés : cloches à sentir, mallettes olfactives, encarts « scratch and sniff ». Elles peuvent aussi être diffusées dans l’air, pour créer des ambiances immersives qui enveloppent tout un espace, selon le type d’expérience olfactive souhaitée.
« Les odeurs et les parfums nous traversent, nous heurtent, nous altèrent, nous habitent. L’art olfactif est une reliance à soi. »

Créée en étroite collaboration avec le studio multimédia Bain de minuit, Territoires olfactifs invite à voyager à travers le temps et l’espace, à faire l’expérience du paysage par ses odeurs. © Michel Julien
L’odeur du territoire
Léa crée donc des œuvres d’art au travers de différentes expositions : « Dans cette pratique, l’odeur devient vectrice d’émotion, de mémoire, de récit. Il y a une tonalité particulière à travers les odeurs qui fait travailler la mémoire. La mémoire olfactive, c’est une mémoire affective aussi! C’est un marqueur supplémentaire de l’expérience artistique. Cela vient toucher une autre forme d’émotions, c’est bonifier l’expérience. »
Elle a une relation intime avec les odeurs du territoire, et tout particulièrement celles d’ici, en Mauricie : « Cette région est très inspirante pour moi, surtout pour son volet nature qui me plait beaucoup. L’exposition Territoires Olfactifs raconte cette relation au territoire par l’olfactif, mon expérience poétique du paysage de la Mauricie. »
Léa s’est installée en Mauricie pour la première fois en 2004 et s’y est de nouveau posée depuis six ans. Elle ressent un attachement fort, poétique et identitaire avec la région : « En montant ce projet [Territoires Olfactifs], j’ai ouvert la porte à un autre projet en lien avec mon histoire d’immigrante. Un autre volet s’est donc développé sur un prochain projet que j’aimerais présenter ici. Il y aura un travail identitaire. J’aimerais aussi revenir à une expression plus plastique en collaboration avec d’autres artistes. »
L’odorat a toujours été reconnu pour son lien profond avec la mémoire. Or, qui dit mémoire dit expérience intime, marquante et personnelle. C’est cette dimension que Léa souhaite continuer à explorer dans ses prochains projets : « Ce qui me plait dans l’odeur, c’est le concept flottant et sa dimension plus personnelle. »
Présentement, Léa travaille sur plusieurs projets secrets. Pour en connaitre davantage, rendez-vous sur son site internet, sur son profil Instagram, sur sa page Facebook ou sur la page Instagram de son entreprise Théodore.
