30 novembre 2023

L’opéra, un classique qui ne se démode pas

Par Élise Rivard

Si l’opéra et le chant lyrique nous semblent sortis tout droit d’une autre époque, ils sont pourtant encore bien vivants, particulièrement en Mauricie. Les sopranos Valérie Poisson et Marianne Lambert nous donnent la note juste sur ce genre musical toujours d’actualité.

L’opéra est né en Italie au 17e siècle avec les premières productions de Peri et Monteverdi. Depuis, il continue de résonner dans notre monde contemporain. Bien sûr, par des productions d’opéra où musique, théâtre et danse se rassemblent, mais aussi, sous forme de concerts intimes qui invitent à tendre l’oreille.

Les préjugés peuvent être nombreux et tenaces. Pourtant, l’opéra ne s’adresse pas qu’aux initié·es. Il suffit d’oser. Pour preuve, la musique classique est très présente dans les films et les jeux vidéo.

« Les gens connaissent beaucoup plus de pièces classiques qu’ils ne le pensent. »

Marianne Lambert, soprano

La soprano Valérie Poisson © Maxime Tremblay

Destinées à chanter

Originaire de la Mauricie, Valérie Poisson a fait ses auditions au cégep de St-Laurent autant en chant jazz que classique. Puis elle a laissé le choix au département de musique de la placer au mieux selon son potentiel. La musique classique l’a choisie.

Bien qu’elle vive avec un handicap visuel, jamais Valérie n’a laissé sa limitation physique la freiner artistiquement ou professionnellement. C’est poussé par son côté fonceur et débrouillard qu’elle a trouvé sa personnalité d’artiste et qu’elle s’est mise à aider d’autres artistes en situation de handicap à se professionnaliser.

« Il y a quelque chose dans le chant classique qui aide vraiment l’âme, qui aide la guérison de soi, autant physique que mentale. »

La soprano Marianne Lambert © Julie Artacho

Le parcours de Marianne Lambert est très semblable. Des projets en chant pop et jazz l’ont amenée à se perfectionner en chant classique pour améliorer sa technique. Au détour, une professeure a détecté son potentiel et l’a convaincue de poursuivre sur cette voie. Celle qui rêvait sinon d’être comédienne a pu combiner ses deux passions avec l’opéra. « C’est l’intensité du chant et du jeu qui est venu me rejoindre. »

Bien que Valérie et Marianne s’imposent une discipline de fer dignes de vraies athlètes, pour toutes deux, le chant lyrique représente la beauté dans un monde fou. Il est universel!

 

Un goût qui se développe

« Il y a encore le préjugé que les billets sont trop chers ou qu’il faut être connaissant. », m’explique Marianne Lambert. Le défi est d’autant plus grand pour briser les préjugés; l’opéra ayant de moins en moins de place dans les médias. Mais comme c’est souvent le cas avec les arts vivants, les gens sont étonnés et touchés quand ils en entendent en vrai, quand ils voient des êtres humains capables de produire ces sons-là, sans être amplifiés. Une vibration humaine, organique, presque miraculeuse.

Marianne compare la consommation de la culture à la nourriture. La première fois qu’on vous présente un plat de sushis, ça peut paraître étrange, mais il faut goûter. « Les gens peuvent penser que c’est démodé ou que ce n’est pas accessible », mais elle remarque l’intérêt et la curiosité des gens quand ils assistent à un spectacle, qu’on s’adresse à eux de façon naturelle et qu’on y fait des blagues. L’opéra, c’est pour tout le monde.

Pour goûter à un extrait de l’album Canzone di notte de Marianne Lambert et de la harpiste Valérie Milot, on vous invite à cliquer sur le lien qui suit.

Voir Marianne à l’œuvre

Marianne Lambert et Valérie Milot dans le spectacle Canzone di notte. © André Chevrier

Valérie Poisson, dans le rôle de Carmen. © Alain Dionne

L’Opéra de Trois-Rivières

Fondé en 2020 par Valérie Poisson, l’Opéra de Trois-Rivières a pour mission de démocratiser l’art lyrique en région et de mobiliser et de soutenir les artistes d’ici. Le tout, en offrant des productions de grande qualité vocale et musicale.

Valérie vient d’une famille ayant l’habitude de chanter autour du piano. Pour elle, la Mauricie est une région chantante. « Le chant ça oblige à prendre du temps pour soi, vivre le moment présent et ça crée des communautés musicales. » Ce type d’art étant peu représenté dans la région, la création d’une maison d’opéra donne à la soprano l’espoir de créer et de mobiliser la communauté autour du chant lyrique. « Le but est d’inspirer d’autres initiatives. »

Avec l’Opéra de Trois-Rivières, Valérie Poisson peut aussi faire écho à deux valeurs qui lui sont importantes : la médiation et l’écoresponsabilité. Cette dernière transparait d’ailleurs dans la création de ses costumes et de ses décors, comme en témoigne la production passée Les Pêcheurs de perles dans laquelle les costumes ont été fabriqués à partir de matières recyclées.

De plus, Valérie a à cœur de décloisonner l’opéra. C’est précisément pourquoi elle tend à ce que ses productions soient présentés dans des lieux inusités et à ce qu’elles soient accessibles, familiales et abordables. « Je veux créer un lien avec mon public, un partage. »

Pour connaître et assister aux futures productions de l’Opéra de Trois-Rivières, dont Hansel et Gretel qui sera présentée le 2 juin 2024, on vous invite à visiter le site Internet de l’Opéra de Trois-Rivières que voici.

La mission de l’organisme vous tient à cœur? Vous pouvez également soutenir leurs activités en prenant part à leur présente campagne de financement en collaboration avec BôSapin. À l’achat d’un sapin de Noël, 20 % des ventes seront versées à l’Opéra de Trois-Rivières.

À droite : Marianne Lambert dans le rôle de Madeleine dans l’adaptation pour l’opéra de la pièce Albertine en cinq temps de Michel Tremblay. © Vé Duplain

Un style qui sait évoluer

L’opéra est moins figé qu’il n’y paraît. Plusieurs initiatives tendent à le faire évoluer et à l’ouvrir aux réalités d’aujourd’hui. Dernièrement, Valérie Poisson prenait part à un enregistrement avec Martin Deschamps pour l’une de ses compositions mixant la pop et l’opéra. La vidéo est à paraître bientôt sur AMI-télé.

L’adaptation de la pièce Albertine en cinq temps de Michel Tremblay en version opéra, en est une autre preuve. Marianne Lambert y tient le rôle de Madeleine. Elle souligne que Michel Tremblay, grand fan d’opéra, a approuvé chacune des étapes ayant mené à la création de cette adaptation des Productions du 10 avril. L’utilisation du joual a même été conservée. « Il a fallu se déconstruire, car on est habitué de chanter en français normatif. Quand on a réussi à toucher la zone du joual, notre réflexe a été de toutes se mettre à pleurer. C’était presque une expérience collective et spirituelle, on se donnait le droit d’être fières. »

Le 9 décembre prochain, Marianne Lambert performera avec l’OSTR à l’occasion du concert de Noël de ce dernier présenté à la salle J.-Antonio-Thompson. L’événement se veut rassembleur, simple et jovial. Les gens seront même invités à chanter avec la soprano. « On a juste besoin d’essayer et de recevoir, de se laisser bercer. » Pour plus de détails, c’est par ici.

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