16 octobre 2024

Les jeux d’évasion : pour s’immerger et s’en sortir

Par Élise Rivard

Une bombe s’apprête à sauter, un fou furieux pourrait vous trouver, un ou une détective à incarner, des codes à résoudre, une conversation d’espions à intercepter… les jeux d’évasion vous baignent dans un grand nombre d’ambiances et de possibilités. Saurez-vous en sortir? Mais surtout, oserez-vous y entrer?

Premier sorti

C’est au Japon en 2007 que Takao Kato développe le premier prototype de jeu d’évasion. L’idée? Placer des participantes et des participants dans une salle à thème où ils doivent résoudre des énigmes pour s’en échapper et où ils doivent prendre des décisions comme dans les livres « dont vous êtes le héros ». Si le concept s’est ensuite répandu partout dans le monde, il faudra attendre 2013 pour voir ce type de divertissement s’implanter au Québec.

En entrevue avec Éric Paul Parent, fondateur et copropriétaire de Mon Enigma, il m’explique qu’à l’origine, ces salles offraient souvent des scénarios d’horreur ou remplies de codes et cadenas, mais avec les années, les concepts ont évolué pour offrir une panoplie d’expériences aux gens.

Briser le quatrième mur

Éric Paul Parent est avant tout un gars de théâtre. Après une maîtrise en théâtre didactique et un doctorat en études et pratiques des arts, il réalise que ce n’est toutefois pas le théâtre classique qui l’attire avec son spectateur passif. Il rêve davantage d’un rapport actif où le public peut faire des choix, « poser des gestes authentiques » comme il le souligne. « Ça crée plus d’impact. »

Inspiré du film The Game, où le personnage de Michael Douglas reçoit en « cadeau » une expérience immersive où il ne distingue plus le vrai du faux, Éric souhaite alors reproduire ce concept, aspect dangereux en moins. Il tente ainsi La nuit de l’horreur, une expérience de 12 heures dans une ambiance de film d’horreur, puis un CSI dans le centre-ville de Trois-Rivières, une énigme de 2 h avec 30 personnes.

Dans la foulée d’ouverture de centres d’évasion qui s’en suit partout au Québec, Éric Paul Parent inaugure Mon Enigma en 2016 qui offre aujourd’hui trois scénarios : L’île des papillons (tension), Mission : PEGASE (espionnage) et Zone 51 (farfelu). Il voit l’avantage de jouer dans un environnement intérieur contrôlé, avec un maximum de dix participantes et participants durant 60 minutes.

lile des papillons enigma

« Vous vous échouez sur une île presque déserte. Serez-vous capables de repartir sain et sauf? » Voilà le genre de défi que vous propose L’île des papillons, l’un des trois scénarios actuellement offerts chez Mon Enigma. © Mon Enigma

zone 51 enigma

« Vous êtes téléportés dans un vaisseau spatial. Que peut bien vous vouloir ce drôle de scientifique derrière la vitre? » Pour le découvrir, il vous faudra user de tous vos talents pour sortir de la Zone 51, l’un des trois scénarios présentement offerts chez Mon Enigma. © Mon Enigma

« La quête est plus importante que le résultat. »

Éric Paul Parent, fondateur et copropriétaire de Mon Enigma

Retourner en enfance

Pour Éric Paul Parent, les salles d’évasion permettent de « rejouer comme lorsqu’on était jeune, mais avec des moyens d’adulte. Ça permet d’explorer des aspects de sa personnalité à travers le jeu. » Les scénarios sont adaptés selon le groupe, l’âge des joueuses et des joueurs et le niveau de confort de chacune et chacun. Il est toujours possible de sortir si on en ressent le besoin. Personne n’est « embarré ». Ça se veut accessible.

Réussir à s’échapper de sa salle est souvent le but ultime, mais il y a plus que ça. « La quête est plus importante que le résultat » nous rappelle Éric Paul Parent. On vit l’expérience en se donnant tous les droits pour jouer sans conséquence, contrairement à dans la vie. C’est très libérateur.

La plus grande particularité de Mon Enigma, c’est ses immerseurs et ses immerseures. À cheval entre l’acteur, l’improvisateur, l’animateur et le maître de jeu, l’immerseur est partie prenante du scénario. © Mon Enigma

L’immersé·e et l’immerseur·e

Si plusieurs concepts de salles d’évasion nécessitent des compétences physiques, de logique ou la résolution de combinaisons de cadenas, chez Mon Enigma, on utilise une clé unique à l’entreprise, « l’immerseur ». Inventé par Éric Paul Parent, les termes « immerseur » et « immerseure » sont bien plus fidèles à la réalité de son personnel qui se distingue de l’acteur, de l’animateur ou du simple maître de jeu en régie.

Lors de ma visite chez Enigma, je rencontre Adamo Ionata et Éloïse Béland, immerseur·es et gestionnaires. Éloïse m’explique la différence entre son travail d’immerseure chez Enigma et celui qu’elle ferait dans d’autres entreprises du genre, par le fait qu’elle est intégrée au scénario du début à la fin de l’activité. Elle est partie prenante de l’expérience et permet de créer une plus grande immersion au jeu. Son travail est basé sur l’action-réaction.

Lors de l’accueil, un bon immerseur ou une bonne immerseure commence par analyser son groupe. Cela lui permet par la suite de mieux le suivre et d’adapter le niveau de difficulté en fonction des gens présents. Elle souligne qu’il faut être capable de camper son personnage avec crédibilité, sans craindre de se ridiculiser, ce qui demande de bonnes aptitudes à improviser et une grande adaptabilité. « Ça rejoint la psychologie, car je regarde le langage non-verbal et selon leurs réactions, je modifie l’intensité. »

Si une expérience en jeu ou en animation est utile pour effectuer ce travail, il faut surtout être au service de la clientèle. Ce n’est pas une compétition entre l’immerseur·e et ses participant·es. « L’immerseur est au service des clients et clientes pour leur faire vivre des émotions ; qu’ils aient du plaisir selon le type d’expérience qu’ils veulent. On joue avec les gens, pas contre eux » me précise Éloïse, dont on sent toute la passion pour son métier très particulier.

Chez Mon Enigma, on y voit passer autant des groupes scolaires, des ami·es ou des collègues de travail en quête d’un 5 à 7 original. Tenté·es de vivre l’expérience? C’est par ici.

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