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- Ota Ici Ute : trois visions, une exposition

Au Centre d’exposition Léo-Ayotte en octobre est présenté un triptyque pluridisciplinaire aussi percutant que pertinent. Trois perspectives et origines : Jacques Newashish, artiste atikamekw, Christine Berthiaume, photographe québécoise, et Maya Cousineau-Mollen, poétesse innue, dévoilent Ota – Ici – Ute, le même mot dans leur langue respective, indice des visions à découvrir. Rencontre passionnante avec le trio lors du vernissage le 11 septembre 2025.
Hommage sur les traces
C’est en discutant lors de ses premières rencontres avec Jacques que Christine évoque Edwards S. Curtis, « un Américain qui, sachant que les nations autochtones étaient appelées à disparaître dans les années 1880, a voulu garder des traces anthropologiques en photographiant toutes les communautés des États-Unis ». Immédiatement, Jacques en fut touché. Il révèle alors que ses premiers dessins furent réalisés à partir de ces mêmes photos historiques. « Moi aussi, les visages me parlaient ». De façon semblable, leur exposition naît autour du portrait. « C’est fort. On y voit l’histoire de la personne, dans son visage. »
Une force ajoutée
En mixant leurs médiums est arrivée la voix de Maya Cousineau-Mollen. D’abord approchée pour être photographiée dans l’exposition, Maya propose plutôt de s’y joindre à l’écrit. « Ils ont aimé ma poésie et l’ont trouvée digne de leur démarche, affirme Maya. Moi je trouve que c’est plus que logique d’être de différentes origines autour d’un projet comme ça, parce qu’on en a désespérément besoin en ce moment. Planétairement, ça ne regarde pas bien… Mais porter des projets comme ça, c’est comme transporter une chandelle dans la pénombre ».
« Nous, on est là, trois petits porteurs d’espoir, avec notre petite allumette dans le vent, on essaie. Moi je trouve ça courageux. »
Maya Cousineau-Mollen, poétesse innue
Douze sujets, un objectif
Douze triptyques saisissants des artistes comprenant chacun une photographie, une toile et un poème de leurs sujets, allant de Kathia Rock à Roy Dupuis, d’Armand Vaillancourt à Nicole O’Bomsawin, de Joséphine Bacon à Richard Desjardins, en plus de Soleil Launière, Gilles Vigneault, Florent Vollant, Christine Beaulieu, Ghislain Picard et Richard Séguin.
Comme l’explique bien Christine Berthiaume : « On cherchait des gens qui ont contribué à bâtir des ponts dans leur carrière, autant du côté québécois qu’autochtone. »
Ota, comme ici
« À Shawinigan, on est encore sur un territoire non cédé de ma nation, rappelle Jacques. C’est ici qu’il fallait que ça se fasse. C’est ici notre rencontre [initiale] pour le projet ». Christine seconde : « Juste le fait que Shawinigan soit un nom atikamekw, c’est quand même extraordinaire, et que ça parte de Jacques qui est un porteur, le pilier ».
Contextualiser et créer
L’exposition met la cause autochtone à l’avant-plan, vivement. « Tant qu’à faire des gestes concrets, ça peut être des tout aussi beaux gestes que des photos et de la poésie, de l’art, défend Maya. Quelque chose qui appelle à tendre la main ». « Moi je trouve ça bien qu’il y ait des personnes qui prennent à cœur le territoire, la forêt, la vie », acquiesce Jacques. Christine s’est aussi sensibilisée au colonialisme dormant dans la culture québécoise. « Il faut arriver, dit-elle, à différencier l’assimilation et l’inclusion. On commence à peine à en parler, de se défaire de l’idée qu’il y a une culture, une nation autochtone, alors que ce sont des cultures, des nations. Il faut pouvoir transmettre ces informations-là, et cette vision ».
Pour le futur
Les artistes espèrent continuer la rencontre avec Ota Ici Ute. « Pour moi, dit Christine, c’est ma façon de faire mon petit bout de chemin, pour continuer d’apprendre, de Maya et Jacques profondément, entre amis et êtres humains ». Pour ce qui est d’autres personnalités qu’ils souhaiteraient immortaliser en images et mots : « Il y a encore des bâtisseurs, des bâtisseuses », selon Maya. « Et il y en a encore des beaux », lance Jacques, « et des belles! » conclut Christine dans le rire.
Vous avez envie d’y aller? L’exposition Ota Ici Ute est présentée au Centre d’exposition Léo-Ayotte jusqu’au 26 octobre 2025.
