18 novembre 2021

5 films techniquement remarquables: Les coups de cœur de 5 cinéastes de la Mauricie

Direction photo, cadrage, montage, animation, lumière, son… Bien qu’ils soient moins connus du public, ces divers aspects techniques du cinéma confèrent à un film une large part de sa qualité, au même titre que son scénario et le jeu de ses acteurs. Pour mieux saisir cet univers où la beauté réside dans l’attention grandiose portée aux infimes détails, cinq cinéastes de la Mauricie proposent et décrivent cinq films qui, de leur point de vue, méritent le titre de chef-d’œuvre technique du septième art.

Snatch © Guy Ritchie

Snatch

Pourquoi ce film mérite le titre de chef-d’œuvre technique selon Dany Janvier:

«Tout d’abord, ce film est à voir pour sa distribution magistrale, dont l’acteur Jason Statham, presqu’un inconnu à l’époque, et un Brad Pitt hallucinant dans un contre–emploi qui, à lui seul, vaut le détour. Il s‘ensuit une ribambelle d’excellents comédiens comme Vinnie Jones, Alan Ford, Benicio del Toro, etc. De plus, l’histoire et les dialogues sont juste parfaits et donnent la définition de ce qu’est un film choral, en plus du montage chirurgical de Jon Harris qui, selon moi, pourrait être une référence dans toutes les écoles de cinéma du monde et une source d’inspiration pour les monteurs en herbe. Harris utilise beaucoup le «split–screen» (écran divisé en plusieurs cadres qui affiche simultanément des images différentes). Par cette technique, certaines scènes sont résumées en très peu de temps et de plans, et demeurent tout à fait compréhensibles… c’est incroyable! Je pense entre autres à une scène où l’acteur Dennis Farina doit prendre un vol de New York à Londres. La scène est résumée par les 6 plans suivants : il raccroche le téléphone, une porte de taxi se ferme, il avale deux cachets avec un shooter, contre–plongée sur l’avion Concorde dans le ciel, une estampe dans son passeport et la lumière de l’enseigne d’un taxi londonien. Tout ça en 5 secondes et tout est clair. C‘est tout simplement magique. Enfin, la trame sonore est, selon moi, la meilleure de toute l’histoire du cinéma. Elle va pourtant dans tous les sens (The Stranglers, Massive Attack, The Herbaliser, Oasis, The Johnston Brothers, Klint, Madonna, etc.), mais demeure d’une efficacité extraordinaire. »

Bande-annonce

The Peanut Butter Falcon © Tyler Nilson, Michael Schwartz

The Peanut Butter Falcon

Pourquoi ce film mérite le titre de chef-d’œuvre technique selon Claudie Simard:

«Quand on parle de technique en cinéma, on pense à tort aux effets spéciaux impressionnants. Mais il faut de grandes connaissances pour savoir capter la lumière naturelle et réussir à la contrôler, et c’est ce qu’a fait le directeur photo Nigel Bluck avec brio dans le film The Peanut Butter Falcon. La douceur de la lumière du soleil à l’horizon m’a touchée, à l’image de la relation fraternelle qui se tisse entre les deux hommes partis à l’aventure. Il n’y a pas de hasard dans un film; la technique est pensée pour servir l’histoire et générer des émotions. Dans ce cas-ci, plusieurs tournages ont dû se faire entre 15 h et 18 h, ce qui laissait peu de temps à l’équipe, mais donnait un résultat optimal en termes de rétroéclairage. C’est ce qui fait que cette formidable histoire m’habite encore, car ses douces images demeurent dans mes pensées. »

Bande-annonce

Stories We Tell © Sarah Polley

Stories We Tell

Pourquoi ce film mérite le titre de chef-d’œuvre technique selon Laurence B. Lemaire:

«Je reviens constamment à ce documentaire qui m’a happée par sa trame narrative originale et accrocheuse qui prend plusieurs tournures inattendues. On sent que la réalisatrice s’est laissée porter par son histoire familiale sans la tracer d’avance, mais tout en l’orchestrant intuitivement au fur et à mesure. Sa réalisation est audacieuse et souple : elle se retrouve à la fois derrière et devant la caméra, brisant le quatrième mur avec le public et avec les membres de sa famille qu’elle interviewe. Elle propose un traitement cinématographique unique où la vérité tangue toujours avec l’imaginaire, en utilisant à la fois de vraies photos d’archives et des reconstitutions de scènes d’époque. C’est un film sensible, touchant, très incarné, qui nous tient en haleine jusqu’à la fin et nous questionne sur la manière qu’on a de se raconter, de créer une mémoire familiale et de faire sens d’une identité.»

Bande-annonce

Visages Villages © Agnès Varda, JR

Visages Villages

Pourquoi ce film mérite le titre de chef-d’œuvre technique selon Carolane St-Pierre:

«D’entrée de jeu, la séquence d’animation donne un ton ludique au film. À bord d’une camionnette photomaton, les deux complices-réalisateurs-photographes, Agnès, 88 printemps, et JR ,33 ans, nous emmènent à la rencontre de paysans, de travailleurs qu’ils photographient et filment. Les monumentales photographies noir et blanc, tapissant notamment les murs des bâtiments, sont saisissantes. L’esthétisme des images, la fluidité du montage et la trame musicale sont toujours en symbiose avec le voyage. Réalisé avec un budget modeste et tourné avec la lumière du jour, ce road movie est un hymne à la spontanéité, à la liberté et à l’imagination. Au-delà de la maîtrise de la technique, il y a l’art de mettre de la vie. Un documentaire humain, touchant, poétique, d’une grande beauté, inclassable!»

Bande-annonce

Mon voisin Totoro © Hayao Miyazaki

Mon voisin Totoro

Pourquoi ce film mérite le titre de chef-d’œuvre technique selon Suzie Bergeron:

«Mon voisin Totoro raconte le quotidien de deux fillettes, Satsuki et Mei, et de leur père M. Kusakabe qui emménagent à la campagne pour se rapprocher de leur mère hospitalisée. Tandis que sa sœur est à l’école et que son père travaille, Mei en profite pour explorer le jardin et rencontre Totoro, un esprit de la forêt. Ce conte évite les clichés en n’ayant aucun antagoniste, mais que des personnages candides, bienveillants et intrigants qui engendrent des moments doux et absurdes, mais surtout humains. Miyazaki réussit à recréer l’imaginaire d’un enfant avec une telle justesse qu’on en redevient un malgré nous. Visuellement, chaque plan du film est simplement magnifique. C’est une œuvre fondamentalement réconfortante et lumineuse.»